06/11/2014
« L’Or du Rhin coule toujours sous nos pieds »
« Au lendemain des élections municipales, à la veille des élections européennes et dans la perspective d’un nouveau découpage des régions de France, il paraît opportun de situer l’Alsace dans sa perspective de développement.
Le Traité de Lisbonne, consacré aux régions européennes, prévoyait dans son Agenda 2020 de renforcer les régions métropolitaines. Où en sommes-nous sur les bords du Rhin ?
La Région Métropolitaine Tri Nationale du Rhin Supérieur (RMT) a été officiellement créée à Offenburg le 9 décembre 2010. Elle est l’aboutissement d’une longue tradition de voisinage et d’interdépendance entre les trois pays riverains. Sous un certain aspect, elle fonctionne. Aujourd’hui, le premier employeur alsacien est la Suisse, le premier investisseur en Alsace est l’Allemagne et le premier pourvoyeur de main-d’œuvre, ressource capitale, aux deux partenaires est la France.
Le premier constat que l’on peut faire est que l’existence de cette structure trinationale est relativement peu connue du grand public. Pour ceux qui en ont entendu parler, les objectifs semblent très « organisationnels » par rapport aux attentes factuelles des citoyens telles qu’elles apparaissent dans l’Étude TNS SOFRES réalisée en 2006 par la Fondation Entente Franco-Allemande. Les habitants voulaient à près de 90 %, quelle que soit leur nationalité : un renforcement de la coopération, un renforcement du bilinguisme, un plan de développement économique et social commun, plus de voies de communications terrestres ferroviaires et numériques, plus de ponts etc.
Une architecture à refonder
En ce qui concerne l’organisation de la RMT, il apparaît que des améliorations pourraient être obtenues en refondant l’architecture. Les quatre piliers, Politique, Economie, Sciences et Société Civile, sont placés sur un même niveau alors que leurs potentiels d’action sont considérablement inégaux.
Les piliers de l’Économie et du Savoir (Sciences, Universités, Ecoles) sont en fait les deux éléments majeurs et vrai blocs moteurs. Non seulement il faut les situer au centre du système mais encore faire en sorte de créer entre eux des connections multiples.
Toute l’histoire de l’industrie depuis son avènement repose sur la relation entre entrepreneurs et chercheurs d’une part, entrepreneurs et salariés d’autre part. Ce double mécanisme se réalise aujourd’hui dans les clusters transfrontaliers dont il faut renforcer l’existence. Les passerelles entre Économie et Savoir doivent concerner non seulement les grandes entreprises, universités et grandes écoles, mais toutes nos entreprises et toutes nos écoles.
Parlant « emploi », et pour éviter la perte potentielle de plus de 50 000 emplois frontaliers alsaciens dans les prochaines années, il faut saluer les expérimentations menées par la CCI Alsace avec le programme « Wirtschaft macht Schule, et les programmes « Mobil pro EU » et « Job for my Life » récemment repris par la Région Alsace (Accord cadre de l’apprentissage transfrontalier).
Il faut des salariés et des acteurs économiques bilingues susceptibles de proposer les services et les produits français à nos voisins suisses et allemands, lesquels font pareil dans l’autre sens.
Une puissance commune
Les trois partenaires de cette aventure ont tous des forces et des faiblesses mais aucun ne peut rêver accéder tout seul à un niveau de compétition mondial. Pour y arriver il nous faut passer de la notion d’espace commun à celle de puissance commune. Cela ne pourra se faire que si l’on emmène la société civile dans cette belle aventure.
Elle est aujourd’hui le maillon faible du dispositif. Or les citoyens représentent le catalyseur incontournable pour réussir la délicate alchimie du « vivre et du réussir ensemble » malgré les différences. Il faut créer chez eux un sentiment d’unité d’appartenance.
À cette fin je propose que le pilier « société civile » réputé être le plus difficile à mobiliser soit en fait placé comme socle et non comme pilier dans l’architecture du système.
Comme la Silicon Valley
La RMT est une appellation trop administrative. De plus elle clive chacun dans son identité nationale. « Upperrhein Rhein Valley », appellation utilisée pour la promotion internationale, « Vallée du Rhin Supérieur » en français ou « Oberrheinthal » en allemand, avec un logo commun, pourrait mieux convenir pour faire émerger cette notion d’appartenance à une même communauté.
La Silicon Valley n’a pas dépensé, administrativement parlant, un centime pour construire son image mondiale. Ce sont les entreprises qui, de la plus petite à la plus grande, se sont identifiées « Silicon Valley ».
Ainsi, des géants du silicium, jusqu’aux maisons de retraite et aux clubs de pêche, tous ont participé à la construction de son image et propulsé cette vallée, encore inconnue il y a 30 ans, vers les sommets de la notoriété mondiale.
Vallée du « Savoir » depuis les Romains, Gutenberg et les humanistes rhénans, le Rhin Supérieur a largement assez d’atouts pour retrouver sa place et revenir à la pointe de la notoriété européenne et mondiale. Ce serait, le plus beau cadeau que cette vallée, enfin européenne et pacifiée, pourrait faire aux générations futures.
Personne n’imagine les retombées et les plus values de ce fantastique projet s’il est poussé à son terme.
Alexis Lehmann, administrateur de la Fondation Entente Franco Allemande
Publié le 06.11.14
08:08 | Lien permanent | Commentaires (0)
11/04/2014
Perspective rhénane
Au lendemain des élections municipales en France et à la veille des élections législatives européennes, il me paraît opportun de situer l’Alsace dans sa perspective de développement au cœur d'un espace européen privilégié. Le Traité de Lisbonne, consacré aux régions européennes, prévoyait en effet, dans son Agenda 2020, de renforcer les Régions Métropolitaines. Où en sommes-nous, ici, sur les bords du Rhin ?
La Région Métropolitaine Tri Nationale du Rhin Supérieur (RMT) a été officiellement créée à Offenburg le 9 décembre 2010. Elle est l'aboutissement d'une longue tradition de voisinage et d'interdépendance entre les trois pays riverains. Sous un certain aspect, elle fonctionne. Aujourd’hui, le premier employeur alsacien est la Suisse, le premier investisseur en Alsace est l’Allemagne et le premier pourvoyeur de MO, ressource capitale, aux deux partenaires, est la France. Cette triangulation est certes évolutive.
Il ne s'agissait pas, dans l’esprit des fondateurs, de créer une Région administrative comme l'appellation "région" pouvait faussement le faire croire, mais "d'assurer une meilleure coordination entre ces trois acteurs". L'objectif étant de faire du Rhin Supérieur une des "Régions les plus compétitives d'Europe".
Ambition hardie du fait de l'absence d'une Grande Métropole Urbaine qui, en général, est à la base de ces concepts, mais ambition carrément audacieuse dès lors qu'il s'agit d'imaginer une Région sur base de trois cultures différentes, de trois organisations politiques, de deux monnaies et de deux langues.
Ambition exaltante, cependant totalement justifiable sur la base des chiffres globaux de cet espace commun : 6 millions d'habitants, 22 000 km², plus de 200 Milliards de PIB.
À date, le premier constat que l'on peut faire est que l'existence de cette structure tri nationale est relativement peu connue du grand public. Pour ceux qui en ont entendu parler, les objectifs semblent très "organisationnels" par rapport aux attentes factuelles des citoyens telles qu'elles apparaissent dans l’Étude TNS SOFRES réalisée en 2006 par la Fondation Entente Franco-Allemande. Les habitants voulaient à près de 90%, et ce, quelle que soit leur nationalité : un renforcement de la coopération, un renforcement du bilinguisme, un plan de développement économique et social commun, plus de voies de communications terrestres ferroviaires et numériques, plus de ponts, etc.
Les deux craintes fondamentales des citoyens étaient alors : la peur de la maladie et la peur du chômage. On peut penser que, sept ans après, la peur de la maladie existe toujours mais que la peur du chômage s’est considérablement amplifiée en Alsace, alors que celle de manquer de MO a augmenté en Allemagne et en Suisse. Ces deux pays sont en effet préoccupés, à juste titre, par le vieillissement de leur population, cumulé avec une baisse de la natalité. Pour l'instant, ils font face à cette pénurie, en employant de la MO étrangère qualifiée, parmi laquelle peu d'Alsaciens en dehors des frontaliers.
En ce qui concerne l'organisation de la RMT, il apparait que des améliorations pourraient être obtenues, en refondant l'architecture du dispositif. En effet, les quatre piliers, Politique, Economie, Sciences et Société Civile, sont placés sur un même niveau alors que leurs potentiels d'action sont considérablement inégaux.
Au pilier "Politique" par exemple, les grandes orientations, le pilotage, les négociations avec les autorités de tutelles nationales et européennes, le développement durable. À lui aussi la gestion des structures administratives communes (Eurodistricts) et celle des voies de communication (fer, routes, fluviales, ponts, aéroports, réseaux numériques etc.). Toutes ces questions, écologie, mobilité et fluidité ne peuvent être réglées qu'au niveau sommital des trois pays, validées par les différents États et par l'Union Communautaire.
Les piliers de l’Économie (acteurs économiques) et du Savoir (Sciences, Universités, Ecoles) sont en fait les deux éléments majeurs du vrai "Bloc Moteur" de cette construction. Non seulement il faut les situer au centre du Système mais encore faire en sorte de créer entre eux des connections qui seront en fait les vrais leviers et les stimulateurs de cet ensemble. Toute l'histoire de l'Industrie depuis son avènement repose sur la relation entre Entrepreneurs et Chercheurs d'une part et entre Entrepreneurs et Salariés d'autre part. Ce double mécanisme se réalise aujourd'hui dans les clusters transfrontaliers dont il faut saluer et renforcer l’existence. Les passerelles entre Économie et Savoir doivent concerner non seulement nos grandes entreprises, nos Universités et nos Grandes Écoles, mais toutes nos entreprises de la plus petite à la plus grande et toutes nos écoles de la plus petite à la plus grande. Former les esprits, à tous les niveaux au fait que notre futur se jouera désormais dans une configuration économique, sociale, écologique tri nationale et bilingue.
"La facilitation de la nécessaire synergie entre les acteurs est la priorité n°1 par les temps qui courent" dit le Président de la Fondation Entente Franco-Allemande Jean Georges MANDON.
Du côté des activités de marché proprement dit, et, malgré la même monnaie pour la France et l'Allemagne, nous sommes encore loin de la "concurrence parfaite". Il reste bien des chicanes et des asymétries dans les domaines fiscaux, réglementaires et surtout sociaux (Droit du travail). Mais, si nous n'arrivons pas ici, sur 200 km de frontières communes avec l'Allemagne à trouver les clés d'une harmonisation et d'une "fluidification" du Marché des Échanges et du Marché de l'Emploi, l’Europe telle que nous la rêvons ne se fera jamais.
Parlant "Emploi", et pour éviter la perte potentielle de plus de 50 000 emplois frontaliers alsaciens dans les prochaines années, les expérimentations menées par la CCI Alsace sont encourageantes, avec le programme "Wirtschaft macht Schule". De même que les programmes "Mobil pro EU" et "Job for my Life" récemment repris par la Région Alsace (Accord Cadre de l'Apprentissage Transfrontalier). Toutes les actions de formation doivent s'inscrire dans cette nouvelle réalité économique et géographique qui veut que, dans cette même région, il faut des salariés et acteurs économiques bilingues, susceptibles de proposer les services et les produits français à nos voisins Suisses et Allemands, lesquels font pareil dans l'autre sens. Les trois partenaires de cette aventure ont des forces et des faiblesses, mais pour prétendre se situer dans la compétition européenne et mondiale des Régions Métropolitaines, chacun doit pouvoir s'appuyer sur le socle commun. Aucun ne peut rêver accéder tout seul à ce niveau de compétition. Les citoyens des Trois Rives savent bien que leur destin est lié. Bien sûr au niveau de l'environnement en général mais aussi au niveau de la compétitivité et surtout de la prospérité de l'ensemble. Pour passer de la notion "d’Espace Commun" à celle de "Puissance Commune" il est indispensable de les inclure dans l'aventure.
La Société Civile est aujourd'hui le maillon le plus faible du dispositif. Or, les citoyens représentent un catalyseur incontournable pour réussir cette délicate alchimie du" vivre et du réussir ensemble" malgré les différences. Et c'est parce qu'ils sont en définitive les vrais acteurs de la réussite qu'il faut leur en donner vraiment conscience.
À cette fin je propose que le pilier "Société Civile" réputé être le plus difficile à mobiliser soit en fait placé comme socle et non comme pilier du système. Au niveau des habitants et des visiteurs, la RMT doit être visible et identifiable. La RMT est une appellation trop administrative. "Upperrhein Rhein Valley", utilisée pour notre promotion internationale, "Vallée de Rhin Supérieur", en français ou "Oberrheinthal" en allemand avec un pictogramme commun d'appartenance, pourrait parfaitement convenir. La Silicon Valley n'a pas dépensé, administrativement parlant, un centime pour construire son image mondiale. Ce sont les entreprises qui, de la plus petite à la plus grande, se sont identifiées toutes " Silicon Valley», depuis les grands noms de la technologie jusqu'aux maisons de retraites. Elles ont ainsi participé à la construction de son image et propulsé le nom de cette vallée, encore inconnue il y a encore 30 ans, vers les sommets de la notoriété mondiale. Le Rhin Supérieur transporte depuis les Romains et avant, en passant par Gutenberg et les Humanistes Rhénans, le savoir et la richesse intellectuelle et culturelle de l’Europe. Cette "Vallée du Savoir" a largement assez d'atouts pour revenir à la pointe de la notoriété européenne et mondiale. Ce serait, en juste retour d'une histoire souvent tragique, le plus beau cadeau que cette vallée, enfin européenne et pacifiée, peut faire aux générations futures. Ce serait aussi le plus bel exemple qu’elle peut donner aux peuples encore en guerre. Personne n’imagine les retombées positives et la prospérité que ce fantastique projet pourrait apporter s'il était poussé à son terme. "L'Or du Rhin" coule toujours sous nos pieds.
Alexis Lehmann
Membre de la Fondation Franco-Allemande
10:07 | Lien permanent | Commentaires (0)
10/12/2012
Quelle solution face au chômage ?
En réaction à l’article intitulé « Allemagne : l’envers du décor » (DNA du 3/12), Alexis Lehmann, ancien chef d’entreprise et membre de la Fondation Entente Franco-Allemande, refuse de stigmatiser la politique de l’emploi outre-Rhin et plaide pour une évolution des mentalités en France.
«Ne faudrait-il pas courageusement adapter notre vieux Code du travail à la situation économique et sociale actuelle ? »
« L’Allemagne n’est pas un exemple à suivre », dit Günter Wallraff, parlant de la structure de l’emploi en Allemagne (DNA du 3 décembre). Fort bien, mais quelle est alors la bonne solution face au chômage ? Certes, ces emplois à court, ou très court terme, à salaire négocié, sans SMIC, ces emplois précaires, journaliers, parfois horaires nous révoltent, nous Français, si habitués à nos garanties légales.
Le coût estimé du chômage se situe entre 50 et 60 milliards d’euros par an en France. Certainement les contraintes humaines sont plus fortes, mais la France, pour l’instant paye cher son dogmatisme en la matière, et ne propose aucune solution d’envergure au problème du chômage de masse auquel elle est confrontée. Plus de trois millions de chômeurs, et 30 % de jeunes en situation de grande précarité. Insupportable.
Le fait de soumettre ces deux récentes mesures phares : les emplois d’avenir et les contrats de générations aux contraintes légales usuelles, prouve que nous sommes encore loin d’une évolution des mentalités.
Nous proposons cinq cent mille emplois d’avenir, sur cinq ans à des jeunes sans emplois. Payés au SMIC, ces emplois, essentiellement publics, seront financés en totalité par l’impôt. De même, les cinq cent mille contrats de générations également payés au SMIC et à durée indéterminée seront eux aussi fortement supportés par l’impôt. Nous aurions peut-être pu initialiser des emplois de ce type avec une rémunération et un temps de travail adaptés par exemple. Car ces mesures évidemment louables, compréhensibles dans l’idée, sont impossibles à tenir ! Quel pays peut supporter une telle charge sans contrepartie ?
Le coût estimé du chômage se situe aujourd’hui déjà entre 50 et 60 milliards d’euros par an en France. En effet, aux 28 milliards d’allocations chômage brutes, il faut rajouter une somme au moins équivalente en manque à gagner fait de charges sociales patronales et salariales non perçues, sans chiffrer une éventuelle perte fiscale.
Se rajoutent quelques milliards pour le traitement même de ce chômage, qu’il soit statique, (organismes spécifiques) ou dynamique (formation).
Pourrons-nous longtemps encore, entreprises et particuliers, supporter ainsi une aide sociale de cette ampleur sans revoir nos critères d’allocation ?
Rien qu’en Alsace nos 84000 chômeurs coûtent chaque année quelque 2,5 milliards d’euros à la collectivité… soit près de trois fois le budget total de la Région !
Les organismes syndicaux de salariés et de patrons devront débattre de cette question, mais il me semble peu acceptable, voire déplacé de stigmatiser les essais d’aménagement de nos voisins qui, en accord entre les « pourvoyeurs d’emplois », et les « preneurs d’emplois » comme ils disent, ont réussi à trouver des solutions pour répartir le poids du chômage sur l’ensemble des acteurs économiques et sociaux. Bien sûr, tout actif en âge et en capacité de travailler veut avoir un emploi et un salaire à taux plein, mais il faut bien se rendre à l’évidence que pour l’instant les mesures de stimulation, soit part la demande, soit par l’offre ont été insuffisantes pour relancer l’activité économique en France.
Faut-il, dans ces conditions, s’obstiner à financer le « nonemploi », comme avant, sans revoir ni la variable « temps de travail » ni celle du « niveau » de salaire par les seuls outils des impôts et des taxes ?
C’est la plus facile et la plus mauvaise des solutions. Les charges fiscales obèrent les entreprises dans leur compétitivité, et donc menacent directement l’emploi salarié, d’autre part elles limitent les salariés dans leur pouvoir d’achat, ce qui se répercute inévitablement sur l’activité des entreprises. De plus, elles chassent et les investisseurs étrangers et les cerveaux. Un cercle vicieux que nous connaissons trop bien.
Ne faudrait-il pas plutôt, courageusement, comme nos voisins, comme, hélas, nos voisins, adapter notre volumineux et vieux Code du travail à la situation économique et sociale actuelle et le replacer, sans rêverie, dans la réalité d’un univers concurrentiel européen et mondial comme la France n’en a jamais connu ?
Le temps « travaillé » et les « niveaux » de rémunération ne sont pas les seules variables d’ajustement, ni les seules clés du quasi plein emploi en Allemagne. Il y en a d’autres paramètres : la compétitivité hors coûts, l’excellence de leur production industrielle, leur positionnement moyen-haut de gamme, leurs talents d’exportateurs, etc.
Mais si, malgré tous ces atouts l’Allemagne devait respecter et notre salaire minimum et nos règles relatives au droit du travail, elle se retrouverait avec un taux de chômage singulièrement plus élevé, un taux d’imposition nettement plus lourd, une compétitivité industrielle handicapée, une balance commerciale déficitaire… !
De quoi nous faire réfléchir… »
12:52 | Lien permanent | Commentaires (1)
22/11/2012
«Les Trente Européennes», un rêve oublié ?
Les informations sont de plus en plus inquiétantes dans les médias : «Strasbourg risque de perdre son Parlement» ou, plus affirmatif, Olivier Mirguet pour Challenges, n’hésite pas à prophétiser hâtivement : «Strasbourg va perdre bientôt son Parlement». Il a peut-être des informations très personnelles ? Cueillies à Strasbourg ou à Bruxelles ? Qui ?
Ainsi les «anti-Strasbourg» auraient gagné ? Sont-ils conscients de ce que signifierait cette amère victoire pour les peuples d’Europe ? Se fondre dans l’anonymat complexe de l’univers administratif de Bruxelles et souligner ainsi avec force qu’il y a bien deux mondes : celui des Politiques et celui des Peuples. Ils seraient définitivement clivés.
Il est vrai que, pour la majorité des parlementaires, l’atmosphère de Strasbourg devenait pesante, lourde, beaucoup trop responsabilisante, encore que la question posée fût celle du siège unique… mais on sait bien que on pense Bruxelles ou plutôt Brussel.
Il règne en effet dans cette ville de Strasbourg et jusque dans l’hémicycle du parlement une atmosphère particulière. Un curieux mélange de souvenir amer de conflits et d’affrontements en même temps qu’un puissant appel à aller de l’avant, un espoir. Une envie de fraternisation, d’ouverture aux peuples, aux cultures, aux différences, une envie de renouveau et d’espérance dans une Europe plus forte, plus humaine, plus juste. C’est l’âme même de ces régions frontalières qui ont tant souffert.
A travers la ville et son Parlement emblématique, à l’architecture si curieusement belle et inachevée, un demi milliard d’hommes rêvent peut-être encore d’un Nouveau Monde Européen. Après les «Trente Glorieuses» puis les «Trente Piteuses», on espérait les «Trente Européennes», celles qui devaient conduire nos vieux pays vers une union politique, économique, élaborée sur la base de nos valeurs humanistes et ainsi les rajeunir aux yeux du monde. Un espace respecté par le monde entier et qui, incontournable, compterait beaucoup plus brillamment, pour le président Obama nouvellement réélu et pour les Américains qui ne pourraient l’ignorer comme ce fut le cas dans la campagne électorale. Ne dit-on pas parfois dans les milieux diplomatiques : «L’Europe, le plus mauvais ami des Etats-Unis mais le seul». Alors ?
Les Etats Unis d’Europe. Cette Europe, c’est dans le «top five» des grandes «nations mondiales», les grands espaces culturels ou civilisationnels, que l’espérait le «fou d’Europe», le grand journaliste Daniel Riot !
Or, non seulement le but est loin d’être atteint, mais après 60 ans de laborieuse gestation, nous voyons revenir des envies de repli sur soi, pays par pays et parfois, à l’intérieur des pays, comme par exemple en Belgique, province contre province…violemment. Des choses que nous n’avions plus vues depuis longtemps. Un spectre de balkanisation qui fait peur.
En fait, les parlementaires, représentants des Peuples, n’ont jamais pu ou su imposer à leur pays, le concept européen de Supranationalité, d’Etat Fédéral ou Confédéral, seul modèle final possible de l’aventure européenne. Vision téléologique, finaliste ? Au moins y ont-ils cru avec leur courte vue ?
Et là, nous hésiterions ? Curieusement, nous accepterions d’être muselés par les Britanniques et leurs amis qui, depuis les gradins de l’Union, n’ont cessé de mettre des bâtons dans les roues de la construction européenne, tout en prenant des distances les plaçant à part ? Il faut dire qu’ils ne sont certainement pas les seuls au monde à vouloir voir l’Europe échouer…
Or, pour arriver à la fin inacceptable de ce magnifique projet, il faut d’abord détruire tous les symboles qui l’ont fait vivre au niveau des citoyens. A commencer par l’hymne européen: «Freude, schöner Götterfunken» et ses promesses de fraternité. Il a été supprimé d’abord. Maintenant, c’est au tour du Parlement dans la ville de sa création, lieu des séances plénières solennelles, d’être «désaffecté», dévitalisé, inutile. Ce seraient -là pour les Européens, les prémices d’une déconstruction, d’un retrait, d’un échec.
Or, sans les Peuples, sans Strasbourg, la ville qui les représente, sans la cohésion Franco- Allemande si tangible sur les bords du Rhin, l’Europe ne se fera jamais. Elle redeviendra un «machin» administratif, désintégré, déshumanisé. Incroyable aboutissement, inchiffrable gâchis !
Vu comme cela, on comprend mieux dès lors que la majorité des parlementaires veuille quitter Strasbourg et l’Alsace, trop empreintes de symboles. Un peu comme on quitte un navire. En perdition ?
Aller de l’avant, c’est aujourd’hui la seule direction possible pour l’Europe.La seule qui prenne en compte le futur des nos enfants. Pas question de lâcher.
Cet article d’Alexis Lehmann est publié aujourd’hui en simultané sur euroJournal.net et le grand quotidien en ligne français Médiapart, ainsi que sur d’autres plate-formes médiatiques.
Alexis Lehmann - 22.11.2012
09:29 | Lien permanent | Commentaires (0)
22/10/2012
Témoignage d’un ancien grand patron
Oui, les grands moments du Forum de la Démocratie à Strasbourg ont bien été ces deux allocutions d'une intensité exceptionnelle. Avec des mots et des concepts très simples, Tawakhol Karman, Prix Nobel de la Paix et Nawal El Saadawi, écrivaine égyptienne ont fait vibrer l' hémicycle. Elles nous ont parlé d'amour, de pitié, d'entraide, de compassion d'appel au secours.... L'évocation de toutes ces souffrances d'hommes, femmes et enfants vivant dans des conditions inhumaines, massacrées et tués sans que personne ne bouge.... A leur écoute tout le Forum était présent de "coeur".
C'est pour cela qu'il faudra le refaire. Et le refaire encore, à Strasbourg, pour que naisse au sein de cette ville emblématique, une nouvelle " Weltanschaung", une nouvelle manière de regarder le futur du monde face aux grands défis de notre terre à l'aube du 21 ° siècle : famines, eau mal répartie, santé scandaleusement négligée, démographie déséquilibrée, religions dévoyées, etc.
Ces questions, nous le savons, ne pourront pas être résolues de manière pacifique sans une prise de conscience, tant au niveau individuel que collectif, au niveau du citoyen et des dirigeants, conscience impérieuse que l'histoire de l' humanité ne peut pas se poursuivre sans partager une conscience d'universalité. Elle n'a que deux manières aujourd'hui d'imaginer son futur : soit la confrontation, la guerre et l'horreur soit l'organisation, la solidarité et la coopération entre les "hommes de bonnes volonté ".
Il est temps de trouver un sens nouveau à la marche planétaire, il est temps de trouver le chemin d'une survie possible pour tous. Répétons que rien ne peut désormais empêcher l'humanité d'aller ou vers la prise de conscience de son unicité et de son interdépendance ou vers le chaos initial.
L'homme est conçu ( par qui ou par quoi ? comme on voudra) pour vivre, donnons en lui les moyens, le plus longtemps possible. Respectons les paramètres de la vie et du vivre ensemble. La Démocratie en est un, les Droits de l'Homme en sont un autre. Si l'homme dans son existence ne construit pas le futur des autres, à quoi, à qui aura-t-il finalement servi.
Je propose donc que le prochain FORUM de Strasbourg jette les bases d'UNE CHARTE UNIVERSELLE DU DROIT DE VIVRE.
Texte publié sur MEDIAPART.
Alexis Lehmann
11:23 | Lien permanent | Commentaires (0)
26/06/2012
Chômage en Alsace : le CESER parle vrai.
Alors que les articles du style « L’Alsace a bien résisté » ou « l’Alsace a mieux résisté » se répètent curieusement chaque année, lors des bilans, une petite phrase dans le compte-rendu d’une réunion du CESER tenue à Mulhouse le 21 juin, ( DNA du 22 juin), jette un pavé dans la mare :
« Le chômage a augmenté en Alsace et en dix ans de 78% » y est-il dit.
Ce constat très factuel est nettement moins rassurant. Il est exact.
L’Alsace a passé de 4,5% de taux de chômage en 2000 à 9% en 2010. Il faut rajouter à cette dure réalité, que, sur les 65 000 frontaliers alsaciens encore en activité chez nos voisins, près de 50 000 d’entre eux ne seront pas renouvelés du fait de l’absence cumulée de jeunes professionnels alsaciens qualifiés, et parlant allemand.
Dans ce domaine d’ailleurs, de la fourniture de MO à nos voisins Allemands et Suisse, l’Alsace est en plus aujourd’hui, en compétition avec les pays européens et méditerranéens (Tunisie, Grèce, Espagne, Italie ,Portugal) touchés par la crise, que des jeunes ressortissants cherchent à fuir pour trouver un emploi chez nos voisins.
Un malheur ne venant jamais seul, il faut hélas rajouter la disparition de plusieurs fleurons industriels alsaciens traditionnels victimes de la morosité économique ambiante.
Tout cela, fait que notre Région, longtemps dans les premières régions de France en terme d’emplois risque, si rien ne change, de se retrouver en grande difficulté sociale.
Il est urgent de sonner le tocsin et de construire un plan prévisionnel pour l’emploi en Alsace.
Plan, qui réunirait les acteurs de l’Economie, de la Formation, du Public et du Privé et qui soit susceptible de mettre en place simultanément, et de manière coordonnée, des séquences d’actions à court, moyen, et long terme.
Par ailleurs il faut poser clairement le problème de la solidarité territoriale au sein de la toute nouvelle Région Métropolitaine du Rhin Supérieur, qui devrait normalement privilégier les synergies de voisinage chaque fois que c’est possible.
Un « Grenelle de l’emploi » en, et pour, l’Alsace » serait, je pense, une vraie bonne idée.
Alexis Lehmann
22/06 /12
12:46 | Lien permanent | Commentaires (0)
09/09/2011
Les cornes des Rhinos s’arrachent à prix d’or…..
Un long article consacré aux rhinocéros est paru dans un grand quotidien régional du 29 août. Ce qui arrive à ces pachydermes d’une autre ère est d’autant plus atroce que le « lien affectif avec ces animaux est énorme», comme le dit l’auteur de l’article.
Je n’ai pu m’empêcher de penser à un autre RHINO qui, figuratif celui-là, voudrait exister en tant que logo et «mascotte» du Rhin Supérieur. Ce RHINO stylisé est le gagnant d’un grand concours organisé au niveau des Ecoles d’Arts Graphiques du Rhin Supérieur. Il a été retenu successivement par un jury artistique et un jury économique comme étant le meilleur «logo commun» possible pour identifier cette région de six millions d’habitants, allemands, français et suisses qui vivent ici sur les bords du Rhin.
Il a, lui aussi, beaucoup d’or dans sa corne, mais, cette fois, pour l’extraire, il ne s’agit pas de le tuer, mais de le faire vivre. Il recèle de plein de vertus stimulantes et répond à une forte demande des riverains pour que nous nous rapprochions plus et réalisions, ensemble, des choses qu’aucun des voisins du Rhin Supérieur ne peut faire seul (Sondage TNS-Sofres Avenir de l’Espace Rhénan 2006).
Tous les domaines fondamentaux : économie, emploi, recherche, éducation, écologie, logistique, tourisme et bien d’autres sont ici étroitement interconnectés. Cette région géographique, d’une grande richesse, RHINO la connaît bien. Il y a vécu ici il y a plusieurs milliers d’années du temps où les hommes ne pensaient pas encore aux frontières. Il porte les couleurs des pierres de nos cathédrales et de nos montagnes. Un crâne fossile de cet illustre ancêtre commun est toujours exposé au Musée d’Histoire Naturelle de Karlsruhe.
Faire revivre sa mémoire aujourd’hui, alors que les frontières ont à nouveau disparu, ferait faire à cet espace tri-national un saut qualitatif magistral dans le futur.
Les instances et organisations politiques poursuivent, dans l’ombre, leurs efforts de coopération. Les intentions et déclarations communes s’entassent de Congrès Tripartite en Congrès Tripartite sans que la population en soit consciente et impliquée. Tout ce travail passe bien au-dessus d’elle et n’entraîne pas l’engouement et la dynamique réalisatrice qu’un tel projet nécessiterait. Pour avoir l’appui des peuples, premiers concernés, dans ce type d’opération, il faut rendre le processus visible.
Ils se sont exprimés, riverains allemands, français et suisses, ils savent ce qu’il faut faire : mettre le bilinguisme en objectif majeur, établir un plan de développement économique et social commun, utiliser à fond les synergies démographiques, rechercher plus de cohérence dans la logistique, les transports terrestres et aériens, l’écologie, le tourisme, l’université, la recherche etc…
Seulement voilà, pour y arriver, il manque l’essentiel, à savoir un identifiant visible pour que cette prise de conscience d’unicité et d’intégration de tous dans un même espace soit compris au niveau des citoyens. Il est hors de question de faire de la publicité pour le Rhin Supérieur dans les pays lointains si les gens qui y habitent ne savent pas de quoi il s’agit.
La région est de fort potentiel, elle est capable de hisser les 6 millions d’habitants qui y vivent et qui y travaillent vers un nouvel horizon de plein emploi, à niveau et qualité de vie élevé.
La Région Métropolitaine Tri-Nationale Métropolitaine du Rhin Supérieur vient d’être officiellement crée en décembre 2010, c’est certes un nouveau pas en avant, mais on peut craindre que si le concept reste au niveau administratif et juridique, rien ne changera. D’où la stratégie proposée par RHINO.
Les organismes officiels rentrent sur le théâtre d’opération en portant les habits de leurs appartenances nationales. Le sigle de la Région Métropolitaine tri-nationale du Rhin Supérieur est en effet un rappel des drapeaux des trois pays… C’est presque contre-productif… Non, pas du tout, que l’on puisse faire l’impasse sur des identifiants fondamentaux tels que sa religion ou sa nationalité. Ces valeurs, identitaires doivent certes, rester immuables et sacrées, mais leur rappel en l’occurrence est parfaitement inapproprié quand il s’agit de créer un sentiment d’appartenance à une nouvelle communauté humaine de travail, de vie, de destin.
La Fondation Entente Franco-Allemande et son Président, le Ministre André Bord, portent ce projet depuis plusieurs années maintenant. La stratégie est considérée comme pertinente pour beaucoup, mais si le relais n’est pas pris par les autorités politiques et administratives on peut craindre que la RMTRS, n’arrive jamais à sortir de sa bulle administrative pour insuffler l’enthousiasme populaire nécessaire à une construction de cette ambition.
Créons ensemble, avec les peuples, au-delà des chicanes politiques et des asymétries administratives de toutes nature, une nouvelle région vraiment européenne, supra-nationale, extra-institutionnelle peut être, mais pleine de promesses, totalement citoyenne, totalement humaine. Le reste, je l’espère, un jour suivra.
En attendant faisons vivre le RHINO et l’or coulera sur les bords du Rhin.
Alexis Lehmann - 09.09.2011
Alexis Lehman est membre de la Fondation Entente Franco-Allemande et soutient 3Ufer/3Rives depuis ses débuts par des tribunes libres.
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Bas les Marques !
Suite à l'article paru dans les DNA le 08 septembre 2011.
Les stratégies de communication des villes, des régions de France ou des régions Européennes sont évidemment diverses dans leurs objectifs comme dans leur univers concurrentiel. Il est très satisfaisant de voir les choses bouger dans ces domaines. Ce qu'il faut éviter c'est un combat politique interne, toxique et stérile, entre des collectivités liées par l'histoire, la géographie et surtout par le destin.
Strasbourg a un positionnement démocratique, il permet à notre Ville plus qu'à toute autre de se présenter comme "Capitale de l'Europe des Peuples".
Nous sortons ainsi d'un combat frontal avec Bruxelles, lieu de rencontre des "Parlementaires professionnels" de l'Europe, nantis des avantages logistiques et autres d'une Capitale d' État.
Il nous permet sur la base d'une cible de plus de 500 millions d'Européens d'attirer ici des richesses économiques considérables issues du tourisme et de la localisation de sièges sociaux d'entreprises tertiaires à vocation et à sensibilité européenne.
L'Alsace, doit c'est vrai, se dégager de son image traditionnelle (choucroute, saucisses, bière, vins, cigognes, etc.), sans pour autant fustiger son industrie alimentaires ou négliger le pittoresque de ses villages. Ce sont des atouts forts. Bien sûr, nous en avons d'autres, plus techniques, plus technologiques comme c'est aujourd'hui le cas dans beaucoup d'autres régions.
Changer notre image prendra du temps et il ne faut pas, c'est vrai, se tromper de discours. Strasbourg aura toujours directement, ou indirectement, un rôle majeur à jouer dans cette actualisation car il n'y a pas au monde de grande région sans grande ville. Elles sont dans la grande majorité des cas les forces motrices des attractivités territoriales.
Le Rhin Supérieur enfin est la seule base pertinente pour inscrire l'Alsace dans une Euro-Région puissante susceptible d'engager la compétition au niveau mondial. Dans cette troïka là il est essentiel que les trois chevaux soient puissants et qu'ils suivent une même feuille de route au moins dans les domaines et les investissements essentiels engageant notre futur à tous.
Trois marchés, trois institutions, trois objectifs, trois stratégies de communications. Mais une seule Région pour laquelle nous nous battons tous.
L'Alsace.
Travaillons ensemble !
Alexis Lehmann
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16/05/2011
L’infatigable militant de l’Europe à Strasbourg
Alors que les offensives contre les sessions du Parlement européen à Strasbourg se multiplient, Alexis Lehmann, 72 ans, remonte une nouvelle fois au créneau pour exhorter les décideurs strasbourgeois à l’audace et à l’initiative. Propos d’un infatigable militant de la place centrale de Strasbourg au sein des institutions européennes…
« J’ai changé trois fois de métier dans ma carrière dans le seul but de rester en Alsace ». Cette fidélité est l’argument n°1 de ce mulhousien d’origine, marié à une colmarienne et qui respire Strasbourg par tous les pores d’une peau tannée par le combat inlassable mené depuis des décennies pour que la capitale alsacienne mérite vraiment son titre de capitale de l’Europe.
« J’ai eu depuis longtemps l’idée de ce lieu d’Europe qui manquait tant à Strasbourg. Je l’ai appelé l’Eurodôme mais ce n’était qu’un nom de code. Le contenu, lui, n’a jamais changé : je reste aujourd’hui, et plus que jamais, convaincu qu’il faut que Strasbourg joue à fond cette carte magnifique que l’histoire lui a procurée. Strasbourg, c’est l’Europe des peuples, pas celle des technocrates. Si nous nous bougeons enfin avec méthode et détermination, l’image de Strasbourg pourra alors essaimer dans tous les pays de l’Union. »
La volatilité politique
Alexis Lehmann se réjouit bien sûr des récentes avancées de la municipalité élue il y a trois ans. Le choix de Roland Ries s’est porté sur le Kaisersgut, à l’entrée de la Robertsau, pour un projet de lieu d’Europe dont la première tranche pourrait enfin voir le jour d’ici à trois ans. Elle prévoit un lieu d’accueil grand public qui, doté d’une scénographie adaptée, permettrait de recevoir un public qui, pour l’heure, notamment les week-end, tombe sur les grilles fermées du Parlement européen et des autres institutions.
Bien tard, pensent certains. Sur ce sujet, Alexis Lehmann n’y va pas par quatre chemins : « A Strasbourg, hormis Catherine Trautmann une fois, les maires successifs ne se sont jamais succédés à eux-même. C’est toujours la même histoire : elle tourne entre Stras et Bourg, le carrefour superbe que constitue notre ville et la cité, l’intra-muros. On s’occupe bien, voire même très bien de la ville et on finit par oublier le carrefour qu’elle représente. En ce qui concerne l’Europe, ce débat est capital, il ne doit plus être différé. A Strasbourg, l’Europe a ses palais pour les parlementaires et les institutions, mais ils vivent à part, fermés au grand public. L’Europe a ses palais mais pas de temple, cet endroit où des milliers d’européens pourraient se parler, mieux se connaître. »
Le plaidoyer pour l’Europe des peuples
« En tant que citoyen européen habitant Strasbourg, j’ai le droit de dire que l’Europe en déçoit beaucoup. On en est même arrivé à un paroxysme actuellement. Les chefs de gouvernements nous racontent des histoires ! Le traité de Lisbonne en 2005 parlait de plein emploi : où en sommes-nous ? Il parlait de lutter contre l’exclusion et la pauvreté : nous n’avons jamais été dans de telles difficultés ! On parlait aussi de l’Europe de la connaissance et de la justice, on promettait de restaurer une vraie conscience économique, on promettait l’essor du vieux continent avec, au passage, une harmonisation sociale : où en sommes-nous là encore ? Beaucoup d’européens ont envie de dire aux chefs de gouvernements et aux technocrates de tout poil : vous êtes des charlots !!
C’est l’Europe des peuples qui doit se bâtir à Strasbourg. Et ce lieu d’Europe en est la première pierre. Il permettra à Strasbourg de dire des choses car Strasbourg a une autre image que Bruxelles dans ce domaine : ici, c’est l’humanisme, l’histoire qui s’est écrite à cheval sur le Rhin, cette ex-frontière guerrière qui est devenue aujourd’hui le symbole de la réconciliation entre les peuples. L’Europe des peuples, c’est ici qu’elle doit être visible, Strasbourg en est le théâtre parfait ! »
De l’audace !
Si le choix du Kaisersgut pour édifier ce lieu d’Europe peut être considéré comme une notable avancée, Alexis Lehmann est cependant inquiet sur les possibilités existantes sur ce site : « J’ai rendu tout le monde attentif : on ne naît qu’une fois dans la vie, mais quand on est mal né, c’est pour la vie entière. Donc, il faut dès à présent instituer un concours d’architectes qui nous donnera une vision globale du projet final, même s’il faudra attendre le prochain mandat municipal pour le voir sortir de terre. »
Néanmoins, l’historique militant européen reste optimiste et exhorte même à l’audace et à l’offensive : « Strasbourg ne doit pas se tromper de champ de bataille. En ce qui concerne l’aéroport, les hôtels, les restaurants d’une grande capitale européenne, on est perdant à tous les coups sur ce terrain de la logistique. Mais Strasbourg est un lieu mythique et emblématique et là, on entre dans un autre cas de figure. A ce que je sache, La Mecque ou Lourdes ne se sont pas bâties près d’Heathrow ! La cible, ce sont ces 450 millions d’européens dont beaucoup sont nés citoyens d’Europe sans même savoir ce que ça voulait dire. Alors, si Strasbourg parvient à s’imposer comme la capitale de l’Europe des peuples, si nous savons leur parler directement –et ça passe bien sûr par ce lieu d’Europe pour que nous puissions tous nous rencontrer-, le maire de Strasbourg pourra leur dire : « Si vous voulez sentir ce qu’est vraiment l’Europe, c’est à Strasbourg que cela se passe. Venez chez nous : à pied, en avion, en vélo, en train, en trottinette mais venez-y ! »
C’est le moment, il faut foncer et être ambitieux, on n’a que trop tardé. On trouvera les moyens, notamment financiers, pour réaliser tout ça : après tout, qui a jamais parlé d’amortissement pour la Tour Eiffel ou la cathédrale de Strasbourg ? Je reste persuadé que notre ville peut restaurer la vraie symbolique européenne, celle qui est basée sur des valeurs humaines, pas celle des technocrates pétrifiés dans leurs bureaux à Bruxelles ! C’est le moment, il faut foncer maintenant ! ».
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14/04/2011
Le Parlement à Strasbourg et Fort Alamo. Une certaine ressemblance ?
Strasbourg mène depuis des décennies une guerre du type «Fort Alamo», totalement défensive, infiniment risquée. A terme la défaite parait certaine. C’est juste une question de temps. Nous sommes pris dans un combat politico-parlementaire aux motivations réelles de fond, bien éloignées de l’intérêt des citoyens européens. Nous subissons régulièrement des assauts portés par des parlementaires eux-mêmes qui pilonnent sans relâche nos «faiblesses» : celle de l’accessibilité et des avantages de tous ordres d’une capitale d’Etat et celle du «rempart conventionnel» du Traité.
Sur le premier point la cause est entendu. Nous ne serons jamais une capitale d’état avec sa logistique, son confort, et ses joyeusetés. Sur le second, celui du Traité, il est clairement de plus en plus ébréché, creusé et ce taraudage se poursuivra jusqu’au jour où nos grands défenseurs Catherine Trautmann, Joseph Daul, Bernd Posselt et d’autres se retireront.
Strasbourg, maintenant, revendique, et c’est tactiquement bien joué, un rapatriement complet du Parlement sur ses terres… Mais pour être suivi dans cette audacieuse contre proposition inverse, il faut que notre ville appuie sa demande non seulement sur sa légitimité historique et sur le traité, mais sur un puissant soutien démocratique des citoyens de l’Union.
Fort Alamo pour y revenir, ne serait jamais tombé si les occupants avaient été aidés par des alliés extérieurs. Or, nous oublions totalement les 500 millions de citoyens européens dans cette guerre-guerre budgétaire faussement vertueuse. Il faut les intégrer dans l’ enjeu.
Espérons que la campagne «Strasbourg The Europtimist» sera l’amorce de cette ouverture et que la foi en l’avenir et en l’optimisme européen soit ici matérialisée, visible, au sein de l’Eurodistrict. Ce sera en fait la bataille des électeurs contre les élus ; celle des valeurs universelles, visibles et durables, contre le gratifiant confort de l’isolement technocratique.
Election après élection, à quelque niveau que ce soit, nous assistons à la séparation de plus en plus évidente de la vie politique et administrative avec la vie réelle citoyens. D’événement en événement, que ce soit en Irlande, au Portugal, en Grèce, etc mais aussi en Egypte, en Tunisie, en Libye… nous assistons à des fractures totales entre gouvernants et gouvernés.
La concentration du législatif et de l’exécutif européen dans une seule ville européenne, Bruxelles, sera en quelque sorte l’illustration suprême de ce divorce rendant la «chose politique» complètement stratosphérique par rapport à la «chose publique» et cette fois, hélas, aux yeux et aux dépens de 500 millions d’européens.
Je me bats avec d’autres depuis des années pour cette idée. Nous avons, j’en reste persuadé, encore, les moyens de gagner cette bataille. Mais là, le temps presse. Vraiment.
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