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15/03/2007

Pierre PFLIMLIN

J’ai connu et respecté cette personnalité d’exception. Après un long cheminement, il était convaincu que l’EUROPE allait pouvoir devenir ce qui lui semblait impensable, miraculeux comme il disait, un système de coopération pacifique entre des peuples longtemps belligérants.

Aujourd’hui, il aurait 100 ans et il pourrait avec satisfaction, constater que la paix tient bon dans une Europe élargie, même si de nombreux conflits persistent encore ailleurs dans le monde.

Il verrait aussi que la guerre économique fait rage à l’échelle planétaire et que l’aspiration légitime des pays émergeants à une meilleure qualité de vie secoue puissamment les piliers de nos modèles sociaux. Ceux-ci se sont développés en temps de guerre froide, à l’abri du rideau de fer, dans un club de pays riches qui fixaient eux-mêmes les prix des matières premières sans tenir compte, ni des conditions économiques, sociales et humaines des pays producteurs, ni des conséquences écologiques dans les pays consommateurs.

Au-delà de la paix, l'Europe a définitivement aujourd'hui d'autres missions de plus en plus élargies.

Il aurait pu lire dans l’éditorial des DNA qui lui étaient consacré que seule une Europe forte dotée d’une politique volontariste pourrait relever ces défis planétaires.

Il aurait pu lire aussi que le Maire actuel de Strasbourg, Madame Fabienne Keller, l’évoquant, rappelait qu’il était la voix d’une ville rayonnante, la voix de la plus Européenne des villes, la voix de l’Europe du sens.

Voix devenue aujourd’hui bien fluette. Plus personne ici n’évoque la primauté des valeurs de l’esprit, ni le sens profond de la dimension éthique de l'Europe sur socle de Droits de l'Homme et de Démocratie.

Strasbourg a pris le parti de devenir une grande ville de province avec son TGV, son Zénith, sa patinoire, son musée…, une grande ville comme les autres, et investit massivement dans ce but. Persuadés que la règle de l'unanimité allait, nous garantir, "à vie", le Parlement, nous allons jusqu'à prendre le risque de ne pas bouger malgré l'accumulation de centaines de milliers de signatures en faveur d'une délocalisation sur Bruxelles. Nous perdrions ainsi cette institution suprême de la Démocratie, le Parlement, légitime fierté de Pierre Pflimlin.

Le Club des Maires dont nous nous enorgueillissons est une association certes remarquable mais qui passe loin au-dessus de la tête des citoyens et loin à côté des structures officielles.

Dans un sondage IPSOS commandité par Strasbourg Promotion Évènement (SPE) aujourd’hui "Strasbourg pour l’Europe" en 2003 on posait aux Strasbourgeois la question suivante : Etes-vous favorables à la réalisation d’un lieu destiné au grand public aux touristes affirmant la vocation Européenne de la ville ? 33% étaient très favorables et 55% plutôt favorables, soit 88% de la population ! Je suis persuadé que nous aurions aujourd'hui des scores encore meilleurs.

Pierre PFLIMLIN aurait, j'en suis sûr, compris que c’était là la vraie mission pédagogique et démocratique de Strasbourg et qu’à travers ce LIEU, ouvert à 500 millions d'Européens, le rôle SYMBOLIQUE de notre ville se serait imposé en toute légitimité, sans conteste, à l'Europe et au monde. Et le siège du Parlement s'en serait trouvé ainsi démocratiquement conforté.

Cette obstination viscérale pour moi est loin d’être seulement un combat pour Strasbourg dont ce serait je le rappelle quand même la seule vraie ‘raison de venir‘ des quatre coins de l'Europe. Un gisement touristique et symbolique sans pareil mais aussi et surtout un élément indispensable à la construction d'une Europe politique démocratique et citoyenne, pour l'instant totalement dépourvue de symbole populaire et de pédagogie explicative.

En septembre va s’ouvrir, hélas à Bruxelles, le Musée de l’Europe. Je n’aime pas beaucoup ce terme de musée alors que je me bats pour un lieu de "prospective d’Europe", pour Strasbourg, que je voudrais ville du futur et non seulement ville du passé. Mais je veux quand même citer les raisons que donne à sa construction le Secrétaire Général du musée Monsieur Benoît Remiche, il dit < L’Europe ne peut plus avancer sous le seul masque de l’économie ; Bruxelles, siège principal des Institutions Européennes, a besoin d’un LIEU où les citoyens européens puissent rencontrer l’Europe sous une forme que la visite de bâtiments administratifs ou d’hémicycles parlementaires, vides la plupart du temps>….

Combien de fois depuis des années n’avons nous dit cela ? Bruxelles va ramasser toutes les mises et ce qui nous paraissait toujours impensable à savoir qu’aucune capitale d'État ne puisse se targuer d’être pour les Eurocitoyens la Capitale de toute l’Europe, Bruxelles va y parvenir sur base de paperasserie et de logistique alors que STRASBOURG aurait pu s'identifier comme telle, sur socle des valeurs de l'esprit qui ont permis un jour à l'Europe de naître à Strasbourg. Strasbourg capitale symbolique et démocratique de l'Europe ; personne n’aurait pu contester la légitimité et la justesse de cette appellation.

Par un curieux détour, il semble que l'histoire veuille repasser les plats. Etienne Pflimlin, fils de Pierre, vient de prendre la Présidence de Strasbourg capitale de la culture en 2013. Je formule le vœu que notre candidature soit retenue sur les bases mêmes de ce qui ferait, sur socle transfrontalier, l'élément majeur de notre différenciation compétitive, à savoir Strasbourg, capitale de la "culture des valeurs d'Europe". Dans tous les autres domaines, nous aurons du mal à lutter avec nos challengers mais un positionnement dans cette philosophie majeure, démocratique et prospective devrait nous permettre de gagner.

Alexis Lehmann - 15 mars 2007

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